Silky Slippery Slope, Silky Lottery's Lys [18+] [Done]

Elle pouffa un peu quand il lui expliqua qu'il serait sa monture pour cette excursion. Et sentit un petit sourire rêveur se former sur son visage. Si un jour, on lui avait dit qu'elle chevaucherait un dragon... Elle s'inquiéta un peu quand il lui dit que l'océan n'était pas très profond. Elle n'était pas sûre qu'ils aient la même définition du mot « profond », mais après s'être élevée plusieurs dizaines de mètres au-dessus de l'eau dans ses bras, elle pouvait bien tenter de visiter les profondeurs. Elle avait confiance, elle savait qu'il veillerait sur elle. Elle se sentit rosir de plaisir quand il la qualifia de « sa reine ».

La sonnerie de son téléphone les interrompit un instant. Elle pensa que c'était peut-être Dez, même si elle savait qu'il lui avait demandé de ne pas l'appeler, elle avait tendance à penser que la fantasque jeune femme ne devait pas être du genre à prendre les ordres de son patron au pied de la lettre, surtout s'il y avait eut un rebondissement particulièrement important dans « My Little Pony ».

Elle s'efforça de rester la plus discrète et silencieuse possible pour ne pas déranger sa conversation, mais elle ne put ignorer le contenu de la conversation puisqu'il avait mis le téléphone sur haut-parleur pour pouvoir garder les mains libres et continuer à la noyer sous des monceaux d'aliments.

Elle ne put retenir un sourire quand elle les entendit échanger des petits surnoms affectueux, même si elle trouvait que « Chaton » était peut-être assez mal adapté au dragon de son cœur. Elle fut attendrie par la tendresse qui émanait de leur relation.

Lys repensa à sa rencontre avec Kara pendant la prise d'otages de l'hôpital. Son corps décharné, ses poignet si fin qu'elle avait eut l'impression que rien qu'en les regardant elle risquait de les briser. Et ce qu'elle avait obligé les Watchdogs à faire. Elle sortit de ses pensées quand elle l'entendit expliquer qu'elle avait réglé son problème de livraison, et qu'elle avait prit un fou rire. Lys faillit ouvrir la bouche pour la remercier elle aussi, mais se reprit et garda le silence. Après tout, elle ne savait pas si la jeune Kara savait qu'elle était avec Drake en ce moment, même si quelque chose lui disait que ces deux-là ne devaient pas avoir beaucoup de secrets l'un pour l'autre. Et puis elle aurait trouvé très impoli d'intervenir dans une conversation privée. Quoi qu'il en soit, elle dut admettre qu'elle était rassurée de savoir qu'elle pourrait encore rentrer dans son appartement quand elle rentrerait à New-York après cette escapade. Elle avait craint de le trouver plein comme un œuf en revenant.

Elle pouffa de rire devant l'expression agacée de Drake quand la jeune femme lui conseilla de mettre un foulard pour ranger la glace dans le congélateur. Visiblement, elle faisait référence à un souvenir un peu vexant pour le jeune homme. L'infirmière fut un peu surprise d'apprendre qu'il pouvait être sujet aux coups de froid, ceci étant dit, elle préférait ne pas imaginer ce qui pouvait advenir quand il éternuait. Elle eut envie de se rendre utile.

« Si tu veux, je pourrais me charger de ranger la glace dans le congélateur. » proposa-t-elle une fois qu'il eut raccroché.

Il apporta d'autres victuailles sur la table, avant de s'installer à coté d'elle. Elle pouffa un peu plus.

« Tu attends de la visite ? J'espère qu'ils sont nombreux vu ce que tu as préparé, il y a de quoi nourrir un régiment. » le taquina-t-elle.

Il se servir à son tour, mais presque à regret, avant de goûter les mets qu'il avait préparé avec ce qui lui sembla être de la méfiance, mêlée d'une certaine curiosité. Elle se rappela leur premier repas et son plat de fruits de mer. Finalement, les fruits de mer étaient une des rares catégories d'aliments qui se consommait « tels quels ». Peut-être que son métabolisme particulier nécessitait une alimentation spéciale ? Elle s'inquiéta un peu, elle s'en voudrait qu'il se rende malade en mangeant quelque chose qui ne lui conviendrait pas juste pour la rassurer.

Il chassa ses pensées d'une délicate caresse sur son épaule, glissant sa main dans ses cheveux pour les ramener derrière son oreille avant d'abandonner son dîner pour poser sur elle un regard sérieux et expliquer qu'il avait pris une grande décision. Elle se mordit les lèvres et dut faire un gros effort pour cacher son amusement quand il lui expliqua sa « grande » résolution.

Elle fut touchée de son attention. Même si elle n'avait jamais trouvé que son haleine soit particulièrement désagréable, elle savait qu'il avait une hygiène irréprochable, surtout bucco-dentaire. Et même si elle-même était non fumeuse, principalement parce qu'avec son boulot, elle avait pu voir les ravages et les souffrances que cette pratique pouvait engendrer, elle ne craignait pas l'odeur du tabac, ni son goût sur les lèvres de son amant.

Elle sourit.

« C'est une bonne résolution, surtout pour ta santé. » dit-elle, se demandant un instant si chez un dragon, le tabagisme pouvait provoquer les mêmes maladies que chez les humains. Puis, elle s'approcha pour réclamer un baiser « Ton haleine ne me dérange pas. J'ai connu des humains bien pire. » précisa-t-elle avec un léger froncement de nez à ce souvenir.

Elle se figea quand il évoqua son boulot et le SHIELD, avant de pouffer de rire des capacités qu'il lui prêtait et du scénario qu'il avait échafaudé.

« Au risque de vous décevoir mon cher, je suis le ninja le moins doué de l'univers, mes résultats aux tests d'aptitude sont à peine suffisant. » expliqua-t-elle en riant, et en se rappelant les efforts de Martin pour lui inculquer les notions de base de la sefl-défense. Elle se rembrunit un peu en se rappelant le fiasco de sa mission à Paris quelques mois plutôt, et chassa aussitôt le souvenir de Dane et de son épée de sa mémoire. Il était l'archétype du chevalier qui avait fait tant de mal à Drake et aux siens. Elle ne voulait pas gâcher l'instant qu'elle vivait avec son dragon en évoquant son ami... Elle réalisa aussi qu'il serait préférable qu'elle s'arrange pour qu'ils ne croisent pas. Même si elle savait que forcément, à un moment où à un autre, il faudrait qu'elle parle de Dane à Drake, mais pas aujourd'hui.

Elle secoua un peu la tête, « Tu as une vision de ce genre d'organisation bien romanesque. Il n'y a pas que des espions au SHIELD. En fait il y a bien plus de petites mains que d'agent de terrain, des analystes, des administratifs, et une infirmière. » précisa-t-elle en souriant. « Phil ne m'a pas recrutée pour mes capacités physiques, ou pour ma duplicité. Je ne t'ai pas menti quand je t'ai dit que j'étais infirmière. Au SHIELD, mon principal boulot est de soigner les bobos du quotidien. » précisa-t-elle.

Mais au fond d'elle-même, une inquiétude commença à poindre. Ce pouvait-il que derrière la plaisanterie se cache une réelle inquiétude ? Pouvait-il vraiment penser qu'elle serait capable de jouer ainsi avec ses sentiments pour le piéger ? Quelle serait capable de feindre l'immense amour qu'elle ressentait pour lui ? Elle le savait méfiant, suspicieux, presque paranoïaque par instant, et vu ce qu'il avait subit, elle ne pouvait que le comprendre, mais elle ressentit tout de même une pointe de tristesse.

« Je peux te jurer sur ce que tu veux que je ne suis pas ce genre de personne. Même si je le voulais, je serais bien incapable d'une telle duplicité. Je suis peut-être l'agent du SHIELD le moins efficace, je ne sais pas mentir, je n'ai pas de malice. Et surtout, penses-tu vraiment que je pourrais faire semblant de t'aimer si ce n'était pas le cas ?» précisa-t-elle d'un ton où pointait malgré elle un peu de tristesse.

Finalement, il enroula ses bras autour d'elle, plaquant son torse contre son dos et sa voix se fit plus sérieuse, et à nouveau, il s'excusa. Elle secoua la tête doucement. Elle ne voulait pas qu'il se flagelle ainsi pour quelque chose qui faisait parti du passé et qui ne pouvait pas être modifié.

Elle tourna la tête, la penchant légèrement sur son épaule en posant une main sur les bras qui l'emprisonnaient, utilisant l'index de l'autre pour venir le poser sur les lèvres de Drake et le faire taire.

« Ne t'excuse pas d'être ce que tu es. Je comprends maintenant. Tu as dû apprendre à te méfier de tout le monde pour te protéger, et je ne comprends que trop ce que tu as pu imaginer en découvrant que je faisais parti du SHIELD. Je n'ai jamais voulu te le cacher, c'est juste ce jour-là, je n'avais pas vraiment la tête à penser au boulot, et je ne pensais pas que c'était important. »

Elle fut touchée par sa vulnérabilité quand il enfouit son visage dans son cou, comme si c'était le refuge ultime. Elle enroula ses bras autour de ses épaules. Fermant les yeux un instant pour savourer la douceur de son baiser et la chaleur de son souffle sur elle.

« Je te promets. Si tu t'éloignes, je ferai tout pour te ramener. »

Silencieusement, il se libéra et commença à débarrasser les reliefs de leur repas en retrouvant son attitude distante, qui ne dura pas bien longtemps. Elle ne sut pas ce qui lui passait par la tête, mais le regard chafouin qu'il lui lança accompagné d'un sourire canaille la firent rougir.

L'histoire du congélateur réglé, le dîner fini, il lui annonça qu'ils partiraient un quart d'heure plus tard, lui proposant d'aller enfiler une tenue... Ou pas. Elle se sentit rougir de son sous-entendu, et choisi d'aller enfiler son maillot de bain. Elle ne sentait pas encore l'âme d'une nudiste, en tout cas pas si elle craignait d'être aperçue par quelqu'un d'autre que lui.

Lorsqu'elle le rejoignit quelques minutes plus tard, elle portait un maillot de bain deux pièces, noué sur la nuque, des lunettes de soleil piquées dans ses cheveux roux remontés en chignon flou, et un paréo gris orné de fleurs jaunes et rouges noué sur sa hanche. Il lança un sac sur son épaule, et ils quittèrent la maison pour une petite balade sur la plage.

« Tu m'emmènes où? » demanda-t-elle en riant, dansant autour de lui, à la lisière des vagues, insouciante et n'hésitant pas à utiliser ses pieds pour shooter dans les vagues et l'éclabousser en riant.

Mais il refusa de lui en dire plus, se contentant de la guider sur la plage jusqu'à un petit ponton privé où était amarré un voilier de taille modeste. Drake lui prit la main pour la guider sur les planches jusqu'à son extrémité, profitant de la promiscuité de l'étroite passerelle pour lui voler un baiser qu'elle lui abandonna sans lutter. Encore une fois son regard l'effeuillant la délicieusement rougir.

« C'est pour ça que tu cuisines pour un régiment ? Tu crains que ton cœur ne soit pas assez solide pour supporter la vision de mon corps de déesse sur le long terme ! » le taquina-t-elle en riant.

Son rire clair fit pétiller ses yeux et creusa de discrètes fossettes dans ses joues. Mais surtout, il fit fondre le cœur de la jeune femme. Il ne riait pas souvent, mais chaque fois, elle avait l'impression d'assister à un spectacle fabuleux et rare. Elle sourit et vint poser ses lèvres sur l'une des fossettes.

« Tu devrais rire plus souvent. Ça te va bien. » murmura-t-elle.

Elle haussa un sourcil en le voyant enfiler la combinaison, visiblement, c'était le but de la manœuvre puisqu'il profita de son air surpris pour la taquiner.

« J'avoue que j'avais espéré profiter de ta plastique irréprochable. » répondit-elle en s'efforçant de prendre un ton aussi neutre que possible pour le taquiner.

Puis il plongea, l'invitant à le suivre, ce qu'elle fit après avoir ôté ses lunettes de soleil et son paréo. Elle frissonna un peu au contact de l'eau encore fraîche en ce début de saison, mais ce léger inconfort fut balayé par la cage des bras de son amant et ses baisers. Finalement, il fit glisser sa main sur la sienne, avant de... disparaître. Elle le chercha des yeux au milieu des vagues, regardant sous le ponton, pensant qu'il lui faisait une blague.

L'océan sembla s'agiter un peu autour d'elle, quelques vagues plus importantes que les autres se levèrent, venant la bercer et l'éclabousser, et puis... Elle hoqueta de surprise, et coula pendant quelques secondes, oubliant même de flotter tant la surprise fut intense.

Elle remonta à la surface, glissa une main sur son visage pour chasser sa frange qui tombait sur ses yeux. Face à elle, émergeait la tête d'un dragon... D'un vrai dragon, immense, cornu, écailleux. Rien qu'à la taille de la tête qu'elle voyait, elle pouvait imaginer l'immensité du corps qui se dissimulait dans l'onde. Elle resta plusieurs minutes immobile, le bras enroulé autour d'un des pilotis de la passerelle pour ne pas couler, incapable de bouger, les lèvres entrouvertes, et les yeux écarquillés de stupeur.

Bien sûr, elle savait que c'était Drake. Elle savait ce qu'il était, elle en avait vu la version miniature la veille dans l'illusion qu'il avait créé pour elle sur la plage, mais une chose était de le savoir, une chose de voir une illusion, une autre de se trouver réellement face à sa forme draconienne. Il était immense, bien plus que ce qu'elle avait pu imaginer, et elle minuscule face à lui. Il aurait pu la gober comme un raisin sec. Elle peinait à reconnaître dans les dents acérées longues comme des épées les crocs qui torturaient si délicatement sa peau. La vague incertitude qu'elle avait ressentit disparue quand elle posa les yeux sur son regard. Ses yeux étaient immenses, à la hauteur du reste de son être, mais elle reconnut immédiatement l'expression qu'elle y lue et le feu qui y brûlait. Elle sentit un sourire involontaire s'étaler sur son visage.

Il était terrifiant, magnifiquement terrifiant, et pourtant, la première surprise passé, tout ce qu'elle ressentait face à cet être fabuleux et immémorial fut de le même amour qu'elle ressentait pour lui quand il était sous sa forme humaine, même si elle ne ressentait pas de désir pour lui. Et de la fascination. Elle prit conscience que peu nombreux devaient être ceux qui avait eu l'occasion de plonger leur regard dans ses yeux d'or et de feu et d'avoir survécu assez longtemps pour savourer la somptuosité de cet instant.

« Drake. » Murmura-t-elle tout à la fois incrédule et fascinée.

Elle relâcha la poutre, et fit quelques battements de jambe pour se rapprocher de son mufle, de ses narines frémissantes, de ses crocs acérés, arrivé tout prés de lui, elle sortit une main de l'eau et l'approcha du bout de son nez. Elle hésita un instant, lui jeta un regard comme pour lui demander l'autorisation avant de poser sa main minuscule et légèrement tremblante entre ses narines. Les écailles étaient fines à cet endroit-là, mais tout aussi acérées et dures, brillantes comme la plus belle laque. Elle y fit glisser délicatement ses doigts en une douce caresse, puis, elle nagea un peu pour se déplacer sur le côté et caresser sa joue écailleuse et se perdre dans les prunelles hypnotisantes.

Puis, il s'éloigna un peu, plongea pour glisser son long cou entre ses jambes, la faisant glisser jusqu'à son garrot, ressortant son corps de l'eau jusqu'au poitrail. Elle poussa un cri tant de surprise que de peur. Peur de se blesser sur ses écailles qu'elle savait tranchantes, pourtant, ce ne fut pas le cas. Comme s'il les avait lissées, emboîtées les unes sur les autres comme des tuiles parfaitement ajustées ne laissant plus paraître la moindre aspérité. Elles étaient lisses et glissantes. Elle serra les mollets et se coucha sur son cou, pour agripper une des épines osseuses qui parsemaient sa nuque et s'y accrocher fermement pour ne pas être désarçonnée.

Quand il tourna la tête vers elle avec une expression qu'elle trouva moqueuse et espiègle, elle secoua la tête en murmurant un « Oh non... » anxieux. Elle n'eut que le temps de prendre une grande inspiration avant qu'il ne plonge au milieu des vagues avec une grâce surprenante pour un être au corps aussi massif.

Les mouvements de ses grandes elles provoquèrent des turbulences qui l'obligèrent à s'accrocher avec encore plus de fermeté pour ne pas être éjectée. Elle eut peur soudain. Drake semblait être nettement moins attentionné et doux que ne l'était sa facette humaine, Seth. Les yeux fermés, la joue posée contre le cou ondulant, elle se demanda s'il était bien conscient qu'elle ne pourrait probablement pas retenir sa respiration aussi longtemps que lui.

L'inquiétude fut de courte durée, moins de trente secondes plus tard, elle eut un court mouvement de panique en le sentant disparaître sous son corps, et une main saisit la sienne pour la guider vers un endroit sous-marin, mais à l'air libre.

Elle prit une grande inspiration, et se laissa tomber à genoux sur un sol rocailleux pour reprendre son souffle et ses esprits avant d'ouvrir les yeux. D'une main, elle chassa ses cheveux mouillés de son visage, et inspira profondément, bouche bée en se relevant, fascinée. Elle tourna la tête en tous sens, se dévissant le cou pour regarder le ciel rocheux où brillait quelques orifices très discrets, laissant entrer quelques rayons de soleil et d'où tombait des cascades brillantes et un peu de végétation. L'air était étrangement frais et pur.

La typologie du lien en elle-même était déjà incroyable, mais ce qui était encore plus surprenant était la quantité d'or, de trésors et de joyeux qui y était entreposés. Elle rit un peu en pensant qu'elle était dans la grotte au trésor de quelques pirates disparus depuis des siècles.

Drake, un pagne de néoprène autour de la taille la guida vers l'intérieur de la grotte, tenant sa main dans la sienne. Il s'approcha d'un coffre ouvert, débordant de perles. Il déposa un baiser sur sa paume avant de chercher dans le tas d'or pour en sortir un coquillage du même métal et le déposer dans sa main, puis avec un couteau, il força le frein et l'ouvrit dans sa main, face à elle. Elle surprit un éclat qu'elle trouva vaguement inquiétant au fond de ses prunelles, une avidité sans fin.

Elle posa les yeux sur le coquillage entre ses doigts. Au milieu des reflets nacrées de l'intérieur, elle découvrit trois petites perles d'une couleur bien peu habituelles. Trois perles écarlates, en forme de poire, brillantes comme trois gouttes de sang sur la blancheur iridescente de la chair du coquillage.

Il la tira de sa réflexion par une question simple, mais qui la plongea dans une réflexion intense.

Elle avait du mal à définir exactement ce qu'elle ressentait. Elle eut un léger vertige. Sa vie déjà pas si calme et ses certitudes vacillantes venaient de voler en éclats. Elle avait l'impression d'être Alice après sa chute dans le terrier du lapin blanc. Elle venait d'entrer dans un monde inconnu, où les dragons existaient, où les coquillages étaient fait d'or et contenait des perles de sang, où tout ce qu'elle croyait savoir vacillait.

Elle se raccrocha à la main de son bien-aimé, plongea ses yeux dans les siens, comme une noyé s'accroche à l'épave de son embarcation pour éviter de sombrer. Elle se raccrochait au seul point fixe de cet univers mouvant. Drake et l'amour qui les unissait. Elle se rapprocha de lui posa son front contre sa poitrine, coinçant la main tenant toujours l'huître entre leurs deux corps. Prenant un instant pour se rasséréner avant de relever les yeux vers lui, et de lui présenter le trésor dans sa main.

« Je mentirais en disant que je ne suis pas un peu perturbée. Je crois que maintenant, je peux dire que je comprends ce qu'Alice à ressentit en traversant le miroir. » répondit-elle d'une voix moins assurée et plus tremblante qu'elle ne l'aurait voulu.

Il ne répondit pas avec des mots, mais la serra contre son épaule, l’enveloppant de sa chaleur réconfortante, la berçant légèrement pour la rassurer. Il la câlina tendrement, lui laissa le temps de reprendre ses esprits autant que possible, même si elle savait déjà qu’il lui faudrait certainement plusieurs jours pour digérer cette expérience extraordinaire, et que probablement après son retour dans son appartement de New-York, elle penserait l’avoir rêvée, avant de s’éloigner légèrement d’elle et de lui prendre la main pour la guider plus avant dans la grotte.

Cet endroit était magique, comme un pont entre la mer, la terre et le ciel. De petites cascades formaient des rideaux opalescents séparant différentes salles de la grotte, comme des rideaux de perles et de soie. À d’autres endroits, c’étaient des feuillages d’un vert intense qui tenait cette fonction. Et partout, toujours, la pierre scintillait d’or.

Le démon la guida à travers quelques-unes de ses salles, lui faisant traverser l’eau et les feuilles pour l’amener jusqu’à une salle encore plus intime que celle de l’entrée. Une salle plus petite, où en plus des trésors répandus un peu partout se trouvait un simple lit et des monceaux de livres.

Elle sourit.

Cette chambre malgré sa situation souterraine était chaleureuse. Elle aimait le désordre qui y régnait et qui contrastait tant avec l’ordre froid et luxueux de l’appartement de son bien-aimé ou du chalet sur la plage. Les trésors et les livres emplissaient l’endroit d’une chaude lumière dorée et de couleur. Azilys avait toujours aimé les livres. Autant pour les histoires qu’ils contaient que pour leur odeur et leur toucher. Elle se sentait toujours sereine et rassurée dans les bibliothèques où les murs de livres semblaient former des remparts inviolables contre les agressions du monde.

Elle s’avança un peu vers les piles de livres, dédaignant encore une fois les bijoux et les trésors, fit glisser le bout de ses doigts sur les couvertures fatiguées, comme si elle saluait de vieux amis. Elle se sentait mieux, la présence de ses amis de papier et d’encre lui rappelait qu’une autre réalité existait toujours.

Elle se tourna vers Drake, le visage rayonnant d’un sourire éclatant.

« J’adore cet endroit ! C’est magnifique. » dit-elle.

Il se rapprocha du lit pour s’y asseoir et tira un peu sur sa main pour qu’elle le rejoigne. Elle ne se fit pas prier pour s’asseoir tout contre lui. Un frisson de bonheur parcourut ses épaules quand il enroula son bras autour de sa taille, étendant sur elle son aile, et se pencha pour poser son nez contre sa tempe avant de l’embrasser tendrement. Elle posa sa tête sur son épaule, se blottissant dans la chaleur immobile qui régnait sous son aile. Elle était bien, en fait, elle était mieux que bien à présent. Elle réalisait qu’elle n’avait jamais ressentit une telle quiétude, une telle sécurité. Elle sentit l’eau se retirer de sa chevelure lorsque le dragon y fit courir ses doigts, et elle rit.

« Avec toi, je n’aurai plus jamais besoin de sèche-cheveux ! » le taquina-t-elle.

L’air se réchauffa dans l’ensemble de la pièce, créant un léger voile de brume au contact du rideau d’eau, donnant à l’endroit un aspect encore plus irréel encore plus hors du temps. Elle était dans un conte de fée. Dans les bras de cet être qui se qualifier de monstre, elle se sentait comme une princesse imaginaire dans les bras de son prince charmant.

Lorsqu'elle croisa son regard, il avait changé. Elle savait maintenant que les deux âmes la regardaient à tour de rôle et qu’elle pouvait savoir lequel des deux s’était à l’aspect de ses yeux. Seth, dont elle s’était engagée à ne jamais prononcer le nom, posait sur elle un regard humain qui lui donnait l’impression de contempler un lac de montagne. Drake la brûlait de ses prunelles d’or. À cet instant Drake avait pris l’ascendant, l’observant de ses pupilles verticales, sombre comme des puits sans fond, entouré de flammes et grenat.

Un instant, un doute l’envahit. Est-ce que ça faisait d’elle une infidèle ? Deux âmes, deux personnalités dans le même corps, deux âmes qu’elle aimait également. Mais c’était une question philosophique bien trop complexe pour elle, surtout plongée comme elle l’était dans son amour fantastique. Et puis, finalement, qu’elle importance cela pouvait-il avoir ?

Quand il prit la parole, elle sentit son cœur se serrer. Elle comprenait sa douleur à voir les êtres humains détruire la beauté de ce monde, au mépris même de leur propre survie, comme les animaux stupides qu’ils étaient. Elle savait pourquoi il avait préféré rester dissimulé ici, au cœur de cette terre qu’il aimait tant, protégé de la folie des hommes. Encore une fois l’entendre utiliser les qualificatifs d’animal et de monstre à son endroit lui fit un peu mal. Oui, il était différent du commun des mortels, mais pour elle, ça ne faisait pas de lui un monstre. Elle était touchée de sa confiance, touchée qu’il lui offre son refuge le plus secret. Elle avait compris à travers ses mots qu’elle devait être la première, en dehors de lui à poser les yeux sur cet endroit. Elle frissonna un peu malgré la chaleur qui l’enveloppait.

Elle rit de sa demande. Il l’embrassa en réponse, tendrement puis avec une sensualité plus appuyée, taquinant le coin de sa bouche de la pointe de ses crocs, avant de taquiner son âme avec des mots.

Lys pencha un peu la tête, levant les yeux vers la voûte rocheuse qui leur servait de ciel de lit, réfléchissant un peu, ne sachant trop par où commencer. Bien sûr, sa vie était moins longue que celle du dragon, mais il faudrait probablement quelques heures pour en faire le tour. Elle avait connu son lot de péripéties, certaines amusantes, d’autres plus sombres.

« Autant s’installer confortablement alors. » Le taquina-t-elle en le bousculant pour le faire tomber sur le dos dans le lit avant de venir se lover contre lui, poser sa tête au creux de son épaule, le regard planté sur les cieux obscurs avant de ce lancer.

Elle lui raconta son enfance tranquille, expliqua pourquoi elle était devenue infirmière, que d’aussi loin qu’il puisse lui en souvenir elle avait toujours eu cette propension à vouloir aider les autres. Elle lui parla de ses études, de ses premières expériences professionnelles qui l’avaient parfois laissée en pleurs des nuits entières de se sentir parfois impuissante face à la souffrance. Elle lui parla un peu de la purge, de la peur, de l’incompréhension, de la violence et de la trahison de son amie.

Elle lui parla aussi de Phil Coulson, et de sa gentillesse surprenante pour quelqu’un dans sa position, de ce qu’il avait fait pour elle, du pourquoi elle était rentrée au SHIELD lorsque les choses furent revenues à la normale.

Et, sans même s’en rendre compte, elle commença à lui raconter la seule mission sur laquelle elle avait été responsable. Cette mission maudite, à Paris, qui l’avait vu revenir au pays, le cœur et le corps blessé comme jamais elle ne l’avait encore été. Involontairement, à ce souvenir, il vint poser ses doigts sur son épaule. Elle avait eu beaucoup de chance, et maintenant, à peine quelques mois plus tard, la cicatrice était déjà presque invisible, à peine une petite étoile aux branches irrégulières, d’un blanc nacré qui ne se distinguait pas beaucoup sur sa peau d’albâtre.

Les yeux fixés sur une cascade de feuillage, légèrement embrumés de chagrin, elle lui expliqua les circonstances, cette mission-farce qui avait tourné en tragédie. Elle lui raconta Dane et sa folie. Elle lui raconta Davide et son ignoble trahison.

« Ce que j’ai vécu ce jour-là, quand j’ai vu sa réaction après avoir reçu mon message, je ne le souhaiterais même pas à mon pire ennemie. C’était odieux, j’ai eu l’impression qu’on m’arrachait le cœur, et pourtant, ce n’était même pas une vraie histoire entre nous. Juste… » Elle chercha un peu ses mots. « Juste une succession de parenthèses. » conclut-elle en ramenant son regard teinté d’une certaine tristesse sur le visage de Drake, y découvrant l’expression que son récit avait fait éclore sur ses traits.

Les heures qui suivirent furent douces, ses baisers et la chaleur de ses bras et de ses ailes autour d'elle la rassurait, déliant ses mots et ses souvenirs, au cœur de cette caverne de conte de fée, la joue posée sur la peau de l'homme qu'elle aimait, elle se livra, racontant même des souvenirs qu'elle n'avait partagés avec personne. Il eut même raisons des réticences qu'elle avait a évoquer Dane et leur amitié.

Elle le sentit se crisper contre elle, et un grognement menaçant, mais elle s'était attendu à ce qu'il n'apprécie pas cette amitié. Finalement, il sembla se calmer, trouvant même quelques mots de réconforts à son endroit. Avant de s'éloigner légèrement, elle sentit sa tension, tant physique que mentale. Son bras quitta ses épaules, son regard perdit son éclat, et même s'il vint poser ses lèvres sur sa main et y appuyer son front elle sentait que la magie s'envolait.

Un instant, il lui dit qu'il compatissait à ce qu'elle avait vécu à Paris, la trahison d'un être cher, la peur, la douleur... Il lui expliqua ses défiances par rapport à Dane qu'il avait vu perpétrer des actes sans noms sous l'emprise de l'épée. Et elle ne pouvait qu'abonder dans son sens. Même si elle connaissait peu Dane, elle savait les ravages qu'il pouvait provoquer quand sa sombre compagne prenait le contrôle sur son âme. Elle n'eut pas le temps d'argumenter.

Finalement, il lui dit ce qu'il avait sur le cœur. Elle n'en fut pas surprise, mais un peu peinée d'avoir gâché ce si beau moment. Mais d'un autre coté, c'était quelque chose qu'elle ne pouvait pas garder pour elle. Elle ne voulait pas avoir de secret pour lui. Elle fut troublée par son attitude, il serrait sa main sur son front, comme si elle devait livre quelque chose dans ses pensées. Ça paraissait important, tellement important qu'elle se concentra, pour la première fois de son existence, elle appela de ses vœux une vision et sursauta en reculant, apeurée quand ça marcha.

Alors qu'il commençait à parler, elle « vit la scène » se dérouler devant ses yeux, se superposant aux trésors de la grotte. Un instant, elle crut que s'était un nouvel enchantement de Drake, avant de réaliser qu'elle ressentait aussi l'émotion des belligérants. Elle vit Dane, l'épée levée face à un Drake fou de rage. Elle sentait la haine. Elle comprit que c'était elle qui avait provoqué cette vision, et qu'elle était la seule à « voir » la scène. Elle sentit les larmes lui monter aux yeux. Elle ne voulait pas voir ce genre de chose, elle ne voulait même pas envisager cette situation. Elle regretta de toute son âme d'avoir réussi à provoquer cette vision.

La vision passa, mais les mots restèrent, Drake continuait à parler, racontant ses diverses rencontres avec Dane et l'Epée, et elle ne pouvait pas le contredire. Elle aussi elle avait eu l'occasion de voir l'effet que cette chose avait sur Dane. Elle baissa tristement les yeux.

Drake acheva de s'échapper, quittant même leur couche, avec une expression qui brisa le cœur de la jeune femme, elle secoua la tête et leva la main pour le retenir, mais la laissa retomber quand il murmura en lui tournant le dos, d'une voix où pointait une inquiétude réelle et non feinte, son inquiétude concernant les intentions de Dane concernant Kara.

Elle soupira, elle ne comprenait que trop bien son inquiétude, même si elle avait envie de lui dire que Dane ne ferait jamais de mal à la jeune femme. Elle savait que Dane ne ferait pas de mal à Kara, mais elle savait aussi que la sombre lame, elle en serait totalement capable.

Quand Drake s'éloigna en direction de l'entrée de la caverne, les ailes dépliées, elle sauta sur ses pieds, laissant échapper un « Qu'est-ce que tu fais ? » étranglée d'inquiétude. Il n'allait quand même pas l'abandonner là ? Elle n'aurait aucun moyen de regagner la surface sans lui. Et a cet instant, elle réalisa à quel point elle était vulnérable, à quel point elle avait eu une confiance aveugle en lui pour le suivre jusqu'au plus profond de l'océan, sans s'inquiéter de sa vie.

Et soudain, elle regretta que ce ne fût pas le cas. Il s'effondra sur ses genoux, juste au bord de l'étendue d'eau qui servait de porte d'entrée à son refuge. Elle vit son corps se déformer, d'immenses griffes déformèrent ses doigts et ses pieds. Ses ailes se déployèrent de toute leur envergure envoyant des flammes dans leur sillage.

Lys hurla, en battant en retraite. Elle se prit les pieds dans un coffret et tomba douloureusement en arrière, se blessant le dos sur les arêtes des joyaux, mais sur le coup, elle ne sentit presque rien, tant elle était choquée. Elle entendit son hurlement inhumain et croisa ses bras sur son visage. Elle était sure qu'il allait la tuer, elle allait brûler vive dans cette caverne, assassinée par l'homme qu'elle aimait et à qui elle avait eu le tord d'offrir son entière confiance.

À travers ses bras, elle vit son visage se déformer de douleur quand des épines osseuses déchirèrent son dos, accompagné d'un nouveau hurlement de douleur. Puis la voix qui s'échappa de ses lèvres figea le sang de Lys au fond de ses veines. Non seulement, c'était une voix qu'elle n'avait jamais entendue, même si elle devinait que c'était celle du dragon, mais les mots qu'il prononça, les accusations qu'il porta, la haine qu'il crachait sur elle la terrifia.

Elle se sentit pâlir, incapable de parler, elle posa dans le regard sauvage et accusateur que Drake lui dardait toute son innocence et son incompréhension.

Mais ce n'était pas suffisant. Il exigeait des justifications.

Il s'approcha d'elle, la saisit pour la plaquer sur le matelas, glissant son corps sur le sien avec brutalité, lui laissant penser qu'il lui réservait la pire des tortures qu'une femme puisse craindre. Elle tenta de se défendre, elle hurla, pleura, mais rien n'y fit. La serre s'approcha d'elle, de son visage, elle sanglota de plus belle serrant les paupières comme si ne plus voir le danger pourrait l'en protéger. Il approcha ses crocs de ses lèvres, elle les sentit les effleurer.

Il n'avait plus rien de l'homme dont elle était tombé amoureuse en quelques heures. Il était devenu le monstre qu'il disait être et qu'elle avait refusé de croire.

Elle regrettait amèrement d'avoir accepté de suivre son cœur plutôt que sa raison. Elle regrettait amèrement d'avoir offert sa confiance à un démon.

« Parce que je n'avais pas pensé à lui avant ! J'ai parlé de lui maintenant parce que j'ai raconté Paris ! » sanglota-t-elle « Je ne t'ai jamais trahi ! Je ne t'ai jamais menti ! Je n'ai jamais trahi personne ! » hurla-t-elle terrifié, même si ça ne sauverait probablement pas sa vie, elle voulait que la dernière chose qu'il entende de sa part soit l'expression de sa conscience sans tâche. « Et tu le sais ! Tu l'as toujours su ! » ajouta-t-elle en sanglotant à nouveau.

Que ses arguments aient portés, ou que quelque chose d'autre soit à l'œuvre, le coup fatal ne vint pas, l'ignoble poids qui lui écrasait la poitrine disparu. Elle le sentit rouler à coté d'elle sur le lit. Elle se recroquevilla sur elle-même, et pleura, pleura jusqu'à en avoir les joues brulées par le sel de ses larmes, jusqu'à ce que le souffle lui manque et que le chagrin, la peur, l'émotion eurent raison de sa conscience.

Lorsqu'elle reprit conscience, elle eut un instant l'espoir qu'elle avait fait un mauvais rêve, ou alors un mauvais trip, une crise de démence. Mais l'espoir mourut quand elle entrouvrit les yeux et croisa le regard épouvantable de Drake. Elle sentit les larmes lui remonter aux yeux, la terreur l'étreindre. Elle aurait voulu fuir, mais son corps se refusait à tout mouvement, elle avait l'impression d'être paralysée, un esprit enfermé dans une prison de chair. De lourdes larmes glissèrent silencieusement du coin de ses yeux.

À coté d'elle, son compagnon était secoué de spasmes, il semblait énormément souffrir, et chacun de ses tremblements laissait apparaître des bijoux, des pièces qui s'entassaient sur le sol de la caverne avec un bruit métallique.

Seth souffrait. Elle eut l'impression qu'il était en train de mourir. Et malgré tout ce qui venait de se passer, malgré la brutalité extrême de Drake, sa violence, les sévices qu'il lui avait infligés, elle savait que Seth était tout autant une victime qu'elle pouvait l'être.

Finalement, au prix d'un effort incommensurable et qui la laissa tellement épuisée qu'elle eut l'impression qu'elle allait à nouveau perdre connaissance, elle réussit à poser le bout de ses doigts sur le poignet de l'hybride à ses cotés, épuisée, traumatisée, terrifiée, elle posa ses yeux dans leur regard éteint, cherchant à y deviner l'azur de l'âme de Seth, et même si elle avait promis qu'elle ne prononcerai jamais son nom sans son accord, à cet instant, elle eut la sensation que c'était ce qui les sauverait tout les deux.

« Seth... » murmura-t-elle alors que déjà elle sentait ses yeux se refermer.

La voix qui flotta à la lisière de sa conscience était triste et douce. Elle ouvrit les yeux pour découvrir un spectacle qui lui retourna le cœur.

Seth se tenait à quelque distance d'elle, une dague ensanglantée dans une main, la paume de l'autre largement blessée. Et à ses pieds, une dessin étrange d'étoile et de runes au centre du quel se tenait ce qui semblait être un petit animal écarlate et agité.

Elle ferma les paupières, et secoua la tête pour essayer d'éclaircir ses pensées plus que perturbée.

Elle l'entendit lui dire de partir, lui indiquer une sortie derrière une des piles de livres. Et un instant, elle en eut vraiment la tentation. Mais, avant qu'elle n'eut pris une décision, elle l'entendit parler à nouveau, mais s'adressant à quelqu'un d'autre qu'elle.

Et la voix de Drake répondit. La voix brutale qu'il avait utilisée avec elle pour l'accuser de la pire trahison. Malgré elle, elle se crispa, et se releva d'un bond... Probablement un peu trop vite d'ailleurs, à peine sur ses pieds, elle se sentit vaciller prise d'un vertige qui obscurcis sa vision.

Et au lieu de prendre la fuite, elle se rapprocha de Seth, réalisant à quel point il avait l'air mal en point avec son visage exsangue et les larges ombres mauves qui s'étalaient sous ses yeux enfoncés dans leurs orbites.

Quand elle se fut rapprochée de quelques pas, elle réalisa que ce qu'elle avait pris pour un animal au milieu du pentacle n'était autre qu'une représentation miniature de Drake. Et les deux âmes s'engueulaient copieusement.

Elle sentit ses jambes mollir. Et préféra s'asseoir avant de tomber.

Bien sûr, elle savait ce qu'il était. Bien sûr, elle avait compris depuis déjà quelques temps que le corps de l'homme abritait deux entités distinctes, chacune avec leur propre caractère, plutôt emporté et égocentrique en ce qui concernait le Dragon. Mais, c'était encore autre chose d'assister à une conversation entre eux.

Les menaces de Seth semblèrent finir par faire entendre raison au dragon, mais elle serrèrent le cœur de la jeune femme. Le jeune homme, malgré sa faiblesse manifeste parlait avec l'aplomb des froides colères.

Elle sursauta quand la voix du Dragon enfla en un cri de colère, et elle haussa un sourcil quand elle l'entendit dire « Je l'aime plus que toi ». Que voulait-il dire exactement ? De qui parlait-il ?

Seth lui lança un regard, comme pour s'assurer qu'elle allait bien avant de revenir à sa conversation avec son alter-égo. Et Lys observait la scène, incrédule, se disant encore une fois qu'elle était forcément en train de rêver, que tout ceci ne pouvait pas être vrai, même si elle était bien consciente que ce n'était pas le cas.

Elle vit l'avatar de Drake se recroqueviller dans sa cage invisible. Quand il s'adressa à elle d'une voix à présent presque piteuse, mais où elle percevait encore un reste d'arrogance, elle secoua légèrement la tête, avant d'éclater d'un rire qui devait plus à la peur, à la nervosité et au stress qu'à un réel amusement, quand elle entendit Seth le prévenir qu'il était puni, s'adressant à lui comme il se serait adressée à un garnement indiscipliné.

L'homme au regard clair se releva difficilement, serrant contre lui sa main blessée et l'invita d'un regard à le suivre. Le temps qu'elle se relève pour le rejoindre, il avait rejoint une pile de livres et poser sa main sur une étrange porte en bois qu'il ouvrait quand elle arriva à sa hauteur. Elle sentit un courant d'air d'abord brûlant puis glacé, et Seth, le dos posé sur le chambranle se laissa glisser au sol, fermant les yeux.

Elle se précipita pour le retenir, mais arriva trop tard, elle ne put que s'agenouiller à ses côtés pour vérifier qu'il était toujours vivant. Les derniers mots qu'il prononça avant de perdre connaissance émurent Lys comme jamais elle avait été émue jusqu'à alors.

Posant deux doigts tremblant sur sa gorge, elle y chercha avidement les pulsations qui lui prouveraient qu'il n'était qu'inconscient. Elle eut un moment d'inquiétude, il lui avait dit que quand il dormait ou qu'il perdait connaissance, il se transformait involontairement. Elle jeta un coup d'œil derrière elle en direction du pentacle, et constata que l'âme de Drake s'y trouvait toujours, sous la forme d'une espèce d'hologramme de dragon miniature dans une pose boudeuse.

« Seth... S'il te plaît, il ne faut pas que tu t'endormes ! » L'appela-t-elle doucement en lui tapotant la joue.

Toute idée de fuite avait quitté l'esprit de la jeune femme, jamais elle ne serait pardonné de l'avoir abandonné dans cet état, jamais elle ne serait pardonné de l'avoir laissé mourir seul au fond de cette grotte sans avoir tenté tout ce qu'elle pouvait pour le sauver.

Elle fut rassurée de sentir quelques pulsations sous la pulpe de ses doigts, même si elles étaient faibles et lentes, elle approcha son visage du siens, et sentit un très léger souffle caresser ses lèvres.

Ignorant le dragon, elle attrapa l'homme sous les épaules, et le fit basculer doucement sur le matelas à côté de lui, le laissant sur le flanc, avant de chercher autour d'elle quelque chose qui pourrait être utile pour le soigner.

Mais à part de l'or, des joyaux et des livres, il n'y avait rien, rien d'utile.

De rage, elle donna un coup de pied dans un tas de bibelots dorés, les envoyant valser dans la vasque qui s'ouvrait au centre de la pièce avant de se précipiter vers la prison de Drake, hors d'elle, folle de colère et de chagrin :

« REGARDE ! Regarde ce que tu lui as fait ! Comment oses-tu le traiter de cette façon ! Lui qui est ton hôte ! Tu parles des humains qui détruise leur monde, et toi, le démon soit disant supérieurement intelligent, tu détruit l'être qui t’accueille ! Tu te plains de la cruauté que tu as subie, mais tu te comportes comme ceux que tu accuses ! »

Elle attrapa la dague que Seth avait abandonnée sur le sol et retourna prés du matelas, dans lequel elle la planta rageusement pour en découper de larges carrés de toile. Puis, elle trouva un petit calice qu'elle alla remplir au ruissellement d'une des petites cascades. Elle goûta l'eau pour vérifier qu'elle soit douce avant de revenir s'agenouiller prés du corps supplicié de Seth.

Avec des gestes aussi doux que possible, elle commença à nettoyer le sang et l'or qui maculait son visage et ses mains.

« Tout au long de ma vie, j'ai vu passer bien souvent des enfants, des femmes, et même des hommes qui portaient sur leur corps les stigmates de l'amour qu'on leur portait. Pour certains, cet amour leur a été fatal. » Commença-t-elle d'une voix trop calme pour être honnête, s'adressant à Drake même si elle lui tournait le dos « Je ne serais pas une de ces personnes. La violence ne deviendra pas mon quotidien. Je ne vivrais pas dans la terreur. »

Elle se déplaça de l'autre coté du matelas pour s'occuper du dos de Seth ou les cicatrices étaient à présent à vif comme si elles venaient d'être tranchées. Elle jeta le premier chiffon au pied du matelas et prit un nouveau carré propre qu'elle trempa dans le calice avant de commencer à nettoyer à nouveau la peau blême de l'homme.

Il frissonnait légèrement, elle eut un pauvre sourire en pensant à sa peur des coups de froid. S'il s'en sortait avec un simple rhume cette fois, rester enfermé dans une caverne pendant quinze jours pour éviter de raser la ville de ses éternuements serait un moindre mal.

Toujours avec la même douceur dans les mains, elle nettoya soigneusement les plaies. Mais les yeux qu'elle posa sur le dragon dans sa prison n'avait rien de la tendresse de ses gestes. Ils étaient sévères, perçant, aussi tranchant que les glaciers dont ils avaient la couleur.

« Recommence une seule fois à me traiter avec une telle brutalité, recommence une fois à le torturer de la sorte pour te défouler, et je vous quitte. »

Seth s'agita sous ses mains, luttant pour entrouvrir les yeux et lui présenter des excuses qu'il ne lui devait pas.

« Chut », murmura-t-elle d'un ton apaisant « Ne t'agites pas. Tu vas te faire mal. »

Elle entendit un mot qu'elle ne comprit pas, prononcé dans le même instant par l'homme allongé devant elle et le dragon miniature à quelque distance de là. Elle regarda les lignes du pentagramme se dissoudre, et le dragon, tête basse quitter sa prison magique et venir escalader maladroitement le matelas mutilé où elle avait installé Seth pour le nettoyer.

Le regard qu'elle jeta au dragon fut sévère. Elle lui en voulait encore, son cœur était gonflé de chagrin et de colère, tant à cause de la violence dont il avait fait preuve à son égard, et qui l'avait terrifiée au-delà des mots, qui lui avait laissé croire que ça dernière heure était venu, et que celui qui mettrait fin à sa vie serait celui qui lui avait ravi son cœur. Pour elle, cette pensée était intolérable, elle ne comprenait pas qu'on puisse brutaliser quelqu'un qu'on prétendait aimer.

Mais elle se rendait compte aussi, qu'elle était déjà en train de pardonner. Pas d'oublier, elle n'en serait jamais capable, mais elle pardonnait parce qu'il ne l'avait pas blessée physiquement, parce qu'elle comprenait qu'il avait réagi par peur lui aussi. Peur d'avoir été trahi par la femme qu'il aimait, elle ne savait que trop ce que cette douleur pouvait engendrer. Après tout, c'est bien cette douleur qui l'avait fait basculer à Paris, qui lui avait fait perdre la raison au point de faire usage d'une arme à feu en pleine rue, sans se préoccuper de qui ses tirs pouvaient atteindre. Mais si elle pardonnait déjà, elle savait que sa décision était prise et irrévocable. Même si elle savait que ça lui briserait le cœur de devoir en arriver là, elle savait que si jamais il se montrait encore une fois violent à son égard, elle lui fermerait son cœur à tout jamais.

Elle n'eut pas un seul geste en direction de l'illusion de Drake. Une de ses mains était posée sur l'épaule de Seth, la caressant délicatement, de l'autre, elle continuait à nettoyer le sang et l'or sur la peau de son dos, effleurant les ignobles cicatrices d'une main aussi douce que possible.

Le Dragon s'assit à coté d'elle et tenta de justifier son comportement.

« La vérité, tu l'as toujours su. Et à quoi bon réclamer la vérité si tu refuses d'écouter les réponses ? » demanda-t-elle. Elle interrompit un instant ses gestes sur le corps de Seth et tourna le regard vers le petit Dragon pour ajouter. « J'ai vécu avant de vous rencontrer. J'ai eu une vie bien remplie, j'ai rencontré beaucoup de gens, des bons et des moins bons, et probablement qu'il y a dans le lot d'autres personnes qui pourraient te déplaire et dont le nom pourrait ressortir au cours d'une conversation. Ce n'est pas parce que j'ai rencontré ses gens que je suis en cheville avec eux pour te trahir ou que j'ai des choses à te cacher. J'ai la conscience tranquille. La duplicité ne fait pas parti de mon caractère. Tu peux me poser toutes les questions que tu veux, et j'y répondrai, mais plus jamais tu ne me traites de cette façon."

Elle sentit un léger sourire flotter sur ses lèvres devant la surprise manifeste que Drake ressentait du comportement récent de Seth, et de l'avoir entendu prononcer les mots « Je t'aime ». Le regard qu'elle posa sur l'illusion se fit plus doux.

« Tu sais, je crois que tu aurais beaucoup à gagner si au lieu de la relation de soumission que tu sembles entretenir avec lui, tu acceptais de vivre en symbiose avec lui. Je crois que vous pouvez vous apporter beaucoup plus l'un à l'autre en collaborant plutôt qu'en vous opposant. »

Elle rit et secoua doucement la tête, prenant la mesure du caractère exceptionnel de la situation. Elle ferma un instant les yeux avant d'ajouter :

« Je suis votre compagne, mais je n'ai pas l'intention de devenir un arbitre quotidien dans vos désaccords. » précisa-t-elle avec un petit sourire.

Elle hocha la tête à sa promesse de faire des efforts, et de la laisser seule avec Seth le temps de réfléchir.

L'illusion se blottit contre la poitrine de Seth et s'y fondit. L'homme papillonna des yeux, désorienté, elle surprit son regard inquiet sur le pentagramme et les petites empreintes griffus qui s'en échappait pour se diriger vers sa couche. Elle glissa un bras autour de ses épaules pour le soutenir quand il voulut s'asseoir.

Dans le regard qu'il posa sur elle, aucune lueur dorée ne dansait. Seule l'âme de l'homme la regardait, inquiète. Elle posa son index sur les lèvres pales de Seth.

« Il m'a fait peur, mais il ne m'a pas blessée, rassure-toi. » dit-elle d'une voix douce et tendre « Et je n'ai rien à te pardonner. C'est avec lui que j'ai réglé ce point de désaccord. » ajouta-t-elle.

Elle sourit en le voyant s'empourprer et détourner le regard au fur et à mesure qu'il se rappelait des dernières minutes avant sa faiblesse. Elle vit la surprise se peindre sur ses traits un instant avant qu'il ne se redresse sur ses genoux. Un instant, il eut l'impulsion de venir la prendre dans ses bras, mais interrompit son geste et lui prit des mains le chiffon pour s'en faire un bandage de fortune.

Le contact des lèvres froides de Seth sur sa paume la fit rosir, et d'une main elle vint caresser son visage, plongeant dans l'azur de ses yeux comme elle avait plongé dans l'océan depuis le ponton. Elle sourit quand il s'étonna d'être seul dans son corps.

« Je sais. » répondit-elle simplement "Il avait besoin de réfléchir."

Un instant, son expression se détendit, un sourire éclaira ses traits et fit pétiller son regard, avant qu'il ne se reprenne et retrouve sa réserve. Dieu qu'il la touchait cet homme timide. Dieu qu'il devait être difficile pour une âme aussi réservée et policée de cohabiter avec l'âme flamboyante et exubérante du dragon. Le feu et la glace dans la même enveloppe charnelle.

Avec un soupir de soulagement maintenant que la crise était passé, Azilys laissa sa tête tomber sur la poitrine de Seth, elle y fit un instant glisser ses lèvres avant d'y laisser reposer son front, en glissant ses bras autour de ses flancs.

« Je crois que je ne vais pas m'ennuyer avec vous deux. » déclara-t-elle avec un petit rire espiègle, retrouvant peu à peu sa légèreté.

L'absence de Drake était flagrante. Elle réalisa que c'était la première fois qu'elle rencontrait Seth, et uniquement Seth. Les autres fois où les yeux d'or cédaient la place aux yeux d'azur, il y avait quand même toujours, sous-jacente la présence de l'âme ancestrale, son impatience, son impétuosité transparaissaient toujours. Là, elle était vraiment seule avec l'homme, et uniquement l'homme.

Il était doux, attentionné, réservé. Ses gestes étaient suaves, pondérés, ses baisers pleins de tendresse, mais son cœur restait assombrit par ce qui venait de se passer. Il se sentait responsable, il le lui dit sans détour, s'inquiétant de leur avenir.

Elle posa sa main sur sa joue, posant dans ses yeux son regard serein.

« Tu n'a rien à te pardonner. Tu n'es pas responsable de ses actes. Et c'est à toi qu'il a fait le plus de mal. » commença-t-elle, et elle le pensait réellement, même si, pour le coup, ça lui paraissait un peu étrange de dire ça à une seule et même enveloppe charnelle.

Cette relation remettait en cause tout ce qu'elle croyait savoir. Elle était obligée d'ouvrir son esprit pour accepter ce qu'elle vivait avec eux, et elle devait bien reconnaître que ce n'était pas forcément facile pour elle. Elle aussi savait qu'un jour où l'autre la colère prendrait le pas à nouveau chez Drake, qu'un jour où l'autre, ils s'accrocheraient à nouveau. Mais au moins, maintenant elle y était préparée, et elle espérait quand même que si les mots pourraient être durs, il ne s'en prendrait plus jamais physiquement à elle.

« Oui, vu son caractère, il y a des chances que nous nous accrochions à nouveau, mais ça, c'est le lot de tous les couples. Tant qu'il ne me brutalise pas, ça ira. Mais en attendant, il ne sert à rien de te torturer avec des hypothèses. Profite du moment. » dit-elle avant de venir poser sa bouche sur la sienne en un tendre baiser.

À nouveau, elle découvrait l'enfant qu'il aurait pu être. Une enfant affectueux, trop longtemps sevré de tendresse. Elle comprenait que Seth se soit renfermé sur lui-même, pour ne pas souffrir. Et là, devant lui, elle avait envie de lui offrir tout cet amour qui lui avait fait défaut, toute cette tendresse qu'il n'avait pas connu. Elle, elle en avait à revendre. Leurs baisers et leurs effusions de tendresses eurent tôt fait de lui faire oublier la brutalité des gestes de Drake. Les douces mains fines de Seth rassuraient sa peau. Même l'absence des crocs qu'elle aimait tant d'habitude lui fut agréable. Elle n'était pas sure qu'elle aurait accepté de s'abandonner ainsi dans ses bras, si tôt après leur dispute, s'il avait gardé ses attributs de Dragon.

Elle se laissa bercer par ses caresses, lui les rendant avec une égale tendresse, gouttant ses lèvres douces et presque chastes, se perdant dans la contemplation de ses yeux d'azur aussi changeant qu'un ciel de montagne, parfois aussi clair et serein qu'un grand ciel d'après midi sans nuage, parfois plus sombres, prenant la couleur des nuages d'orages qui rodent à l'horizon.

Drake était un amant insatiable et passionné, Seth était un amant délicat, dont elle n'apprécia pas moins les douces attentions, se laissant soulever et câliner avec délectation par ses grandes mains douces exemptes de griffes.

Il se baissa vers le sol, et elle fronça un peu les sourcils, curieuse. Un halètement de surprise lui échappa quand il déposa au creux de sa main ce qu'il venait de cueillir au pied du matelas éventré. Trois gouttes écarlate. Trois gouttes de sang. Elle ne savait pas bien comment l'interpréter, mais au fond d'elle, quelque chose s'agitait, comme le souvenir d'un savoir ancestral oublié de nos jours, comme si quelque chose de l'ordre de l'instinct primaire et animal cherchait à attirer son attention sur ce présage. Quoi qu'il en soit, elle sut qu'il lui faudrait garder précieusement ses trois larmes, elles faisaient partie de son histoire à présent, de leur histoire. Elle leva les yeux vers Seth et sentit son cœur se serrer à la vue d'une perle incolore sur sa joue. Elle eut la tentation de venir l'essuyer, mais elle se rappelait qu'il n'avait pas aimé ce geste la dernière fois qu'elle l'avait fait.

« Ne me remercie pas. Je n'y suis pour rien. » murmura-t-elle en venant poser ses lèvres sur sa joue.

Elle ferma les yeux et sentit sa gorge se serrer douloureusement quand il exprima sa peur de la perdre. Elle non plus ne voulait pas le perdre, elle avait l'impression que son cœur n'y survivrait pas, et pourtant, elle savait déjà que si Drake se comportait à nouveau comme il l'avait fait plus tôt avec elle, elle n'aurait d'autre choix que de mettre un terme à cette situation. Malheureusement, elle ne pourrait pas quitter Drake tout en restant avec Seth. Mais elle ne voulait pas penser à ça maintenant. Elle voulait savourer l'instant présent, se gorger des moindres petit moment de bonheur qu'ils pourraient passer ensemble.

« Moi non plus je ne veux pas te perdre. Et je ferais tout ce que je peux pour que ça n'arrive pas. » répondit-elle en se lovant contre lui, se laissant bercer dans ses bras quand il se dirigea vers la porte.

Elle était sure qu'il avait voulu sa déclaration rassurante, mais elle ne fit que l'inquiéter un peu. Elle posa son nez dans son cou, cherchant le réconfort de son odeur en fermant les yeux comme il le lui avait demandé. Elle sentit au déplacement d'air qu'il avait ramené son aile au-dessus d'elle, elle se sentit rassurée. Avec lui l'expression « prendre quelqu'un sous son aile » prenait tout son sens, dans la chaleur de ce doux bouclier, elle savait qu'il ne pourrait lui arriver aucun mal.

Effectivement, elle ne sentit rien, pas même la caresse de l'eau quand ils émergèrent des vagues. Elle frissonna un peu dans la fraîcheur de la tombée du jour lorsqu'il fit disparaître ses ailes, se laissant bercer par ses pas, alanguie dans ses bras, le nez niché dans le creux de son cou, et un léger sourire de bonheur flottant sur ses lèvres. À cet instant, plus rien n'avait d'importance. Tout ce qui comptait, c'était le bonheur de cet instant parfait.

« Je t'aime. » murmura-t-elle contre sa peau en réponse à ses chuchotements amoureux, se sentant rosir de plaisir et de gène de ses louanges à son égard.

Il lui fit passer le seuil de sa demeure dans ses bras avant de l'autoriser à fouler à nouveau le sol, le temps d'aller chercher une serviette de la taille d'un drap dans laquelle il l'enveloppa amoureusement avant de l'abandonner le temps d'aller se vêtir. Elle sourit un instant en le voyant redescendre vêtu d'un chandail et d'un jean. Avec cette tenue et ses cheveux humides, il lui rappela l'inconnu de Little Italy.

Elle ne sourit pas longtemps en voyant le bandage sale de sa main qui laissait échapper des larmes écarlate qui souillaient ses doigts, cette vision lui rappela les événements qu'elle venait de vivre, mais surtout, éveilla en elle son instinct d'infirmière. À son tour, elle se hâta de monter dans la chambre pour passer une tenue plus correcte, en l'occurrence, la seule qu'elle avait avec elle, la jolie robe rouge, et échanger les perles cramoisies contre le kit de premier secours qu'elle trimbalait toujours dans son sac.

Le temps qu'elle redescende, Seth s'affairait à préparer du thé. Elle s'approcha dans son dos, posa son menton sur son épaule et fit glisser sa main sur son bras, jusqu'à sa paume blessée.

« Le thé attendra. Il faut soigner ça. » souffla-t-elle à son oreille, ponctuant sa phrase d'un baiser sur son lobe, avant de saisir son poignet et de l'obliger à s'asseoir.

Prenant place face à lui, elle commença par retirer le bandage de fortune en grimaçant de dégoût de voir cette main aimée ainsi mutilée par sa faute.

« Je suis tellement désolée d'avoir provoqué tout ceci. » dit-elle, gardant les yeux baissés sur la blessure qu'elle commença à panser avec douceur, malgré la brume qui occultait un peu sa vision.

Il bâillonna ses excuses d'une série de baisers avant de lui expliquer pourquoi elle n'était plus autorisée à lui présenter des excuses.

« Je ne peux pas te le promettre. Je ne suis pas du genre à rejeter ma responsabilité sur les épaules de quelqu'un d'autre, mais je vais essayer de faire un effort si ça te fait plaisir. » répondit-elle d'un ton taquin.

Elle rit de sa menace de lui chanter des chansons d'amour pour la punir, son rire s'étrangla quand il s'échappa de ses soins, posant un genou à terre avant de commencer à chanter. Elle se sentit rougir tout à la fois embarrassée et flattée. Elle cilla un peu, même si son français était plutôt balbutiant, elle comprenait quelques bribes de phrases ici ou là, principalement celles du refrain, et l'émotion qu'il mettait à les chanter ainsi l'harmonie de sa voix la touchèrent au plus profond de son cœur. Non, elle ne voulait pas le quitter.

Il ponctua sa prestation d'un baiser sur sa main, et dans le silence revenu où flottait encore les fantômes de la mélodie, elle s'entendit répondre.

« Je ne veux pas te quitter. Je voudrais que cette escapade ne finisse jamais. Je voudrais rester pour toujours ici, avec toi. »

C'était une sensation nouvelle pour elle. Elle n'avait jamais vécu avec personne, même les quelques relations sérieuses qu'elle avait eut au cours de sa vie ne lui avait jamais donné l'envie de renoncer à sa liberté. Elle était de celles qui disent que chacun chez soit était une bonne solution, qu'à vivre trop l'un contre l'autre, on finissait par s'agacer. Pourtant, avec lui, elle rêvait de ne jamais devoir le quitter, ne serait-ce que pour quelques heures.

Il allégea l'atmosphère en la menaçant, la prochaine fois, de se produire en public avec un autre chanteur français. Elle rit un peu avant de se mettre à fredonner le refrain d' « Emmenez-moi. »

Elle récupéra sa main pour tenter de finir de la panser, elle essuya à nouveau le sang mélé d'or qui avait recommencé à suinter de la plaie, fronçant un peu les sourcils quand elle crut y percevoir un furetif éclat bleuté, mais Seth était d'humeur taquine, et détourna son attention en bougeant ses doigts contre les siens pour la faire rire, rendant l'installation du pansement un peu aléatoire. Finalement, elle arriva à ses fin, et levant les yeux vers le visage de son compagnon le découvrit aussi écarlate qu'une pivoine, comme si un soudain accès de timidité l'avait envahit.

« Et bien, nous voilà bien assortis. » le taquina-t-elle en se penchant pour lui voler un baiser « Tes joues sont de la même couleur que ma robe. » précisa-t-elle dans un éclat de rire.

Après une chaste étreinte empreinte d'une infinie tendresse, comme à regret, il la libéra pour rejoindre les fourneaux de la cuisine lui intimant l'ordre de passer à table.

Elle rit et s'exécuta, le regardant s'affairer à la préparation du repas. Elle trouvait drôle que lui, qui ne goûtait même pas à ses plats prennent tant de plaisir de les préparer. À sa façon de cuisiner, elle devinait qu'il ne le faisait pas uniquement pour lui en mettre plein la vue, comme aurait pu le faire un autre homme voulant impressionner sa nouvelle conquête. Il semblait avoir une expérience certaine de l'art culinaire, et prendre beaucoup de plaisir à la préparation des plats.

Elle repensa à ce qu'il lui avait confié concernant Kara. Peut-être était-ce pour elle qu'il s'était découvert ces talents. Peut-être qu'il arrivait à la convaincre de s'alimenter un peu quand s'était lui qui préparait ses repas ? Elle espérait que s'était le cas, autant pour l'un que pour l'autre.

Un instant, l'attention de la jeune femme fut attirée par une lueur étrange sous le col de son chandail. Elle fronça les sourcils, réalisant en un instant qu'il avait réussi à lui faire oublier pendant quelques heures la réalité de sa condition. Depuis leur retour, il avait été tellement « normal » qu'elle avait presque l'impression d'avoir rêvé les merveilles de la veille et la caverne au trésors. Comme s'il avait perçu son trouble, il se retourna, et l'inquiétude qu'elle ressentait un instant plus tôt se dilua dans l'azur de son regard.

Il acheva ses préparatifs avant de venir la rejoindre devant une table croulant sous les plats, elle se tourna vers lui ouvrant déjà la bouche pour lui faire une réflexion sur les effets que toutes ses victuailles pourraient avoir sur son tour de taille, mais elle n'eut pas le temps de proférer un son qu'il la maquillait d'un trait de sauce, avec un regard de gamin espiègle.

Son rire fut mâtiné de soupir, le souffle chaud de Seth sur sa peau, son murmure à son oreille, qui eux n'avait rien de l'innocence de l'enfance, provoquèrent une onde de chaleur qui prit toute la place dans sa poitrine, comme si soudain son cœur gorgé de tout l'amour qu'elle ressentait pour lui se trouvait à l'étroit dans sa cage.

Elle se sentit affamée soudain. Mais l'objet de son appétit ne se trouvait pas parmi les plats couvrant la table. Frémissante, elle se tourna pour lui faire face, posa une main à plat sur la poitrine de son bien-aimé, avec un regard où la passion le disputait à l'amusement pendant qu'un petit sourire délicieusement canaille relevait un coin de sa bouche. Elle se leva le poussant de sa main, l'obligeant à reculer vers un des sièges, jusqu'à ce que l'arrière de ses genoux buttent contre le bord de l'assise, l'incitant à y prendre place.

Elle se pencha pour réclamer ses lèvres, relevant le bas de sa robe pour libérer ses mouvements et enfourcher ses genoux. Elle se coula sensuellement contre son corps, enroulant ses bras autour de ses épaules et de son cou, approchant ses lèvres des siennes, presque à les frôler mais sans les toucher.

« Plutôt que la guerre, je préfère faire l'amour » sussura-t-elle sensuellement, avant de glisser ses doigts dans ses mèches brunes et de l'embrasser avidement.

Même si elle savait qu'il l'aimait autant qu'elle, même si elle savait qu'il la désirait autant qu'elle, elle se détendit un peu de le voir répondre à ses avances, elle avait craint un instant que sa petite mise en scène et ses mots ne heurtent sa réserve toute Anglaise et sa timidité charmante. Mais sa réserve et sa timidité ne s'appliquaient pas à ce genre d'instant entre eux.

Les doigts emmêlés dans sa chevelure brune, les yeux fermés du bonheur de savourer la douceur de ses lèvres, elle frissonna de plaisir en sentant les mains de son bien-aimé glisser sur ses jambes.

Ses mains quittèrent ses jambes pour venir s’emparer de sa chevelure, la relever pour offrir sa nuque à ses baisers, ses lèvres explorèrent ses tempes palpitantes, le sillon délicat sous son oreille, pendant que ses mains glissaient le long de ses vertèbres, lui faisant découvrir de nouveaux frissons, chaque effleurement de ses paumes faisant éclore des ondes de chaleur qui déployaient leurs anneaux sur sa peau, la colorant de passion, l'amenant à cambrer la taille, à se plaquer contre son torse. Déjà, son souffle se faisait plus rapide, plus brûlant.

Toujours noyée sur ses lèvres chaudes et douces, à son tour, elle laissa ses mains s'aventurer dans le dos de son amant, devinant sous ses doigts les contours des runes qu'elle contourna sans même y penser, dessinant dans le dos de Seth une étrange serpentine.

Patiemment, lentement, les mains de Seth remontèrent à son épaule, l'effeuillant délicatement de son pétale écarlate pour en découvrir la pale rondeur qu'il savoura un instant du bout des lèvres, avant de lancer une expédition vers un nouveau territoire. Elle laissa sa tête tomber en arrière, enroulant ses bras autour des épaules de son compagnon pour éviter de basculer, frissonnant de ses doigts explorant la naissance de son décolleté, de ses baisers picotant sa peau. Il était patient, explorant tranquillement, du bout des doigts et avec soin chaque centimètre carré de la peau qu'il pouvait atteindre, comme s'il la découvrait pour la première fois, la noyant de baisers.

Elle redressa la tête, et à son tour ploya le cou pour venir enfouir son nez dans sa chevelure, et envelopper de ses bras quand il posa sa tête contre son cœur. Elle se sentit sourire, à l'idée qu'il puisse entendre à quel point il le faisait battre comme jamais avant il n'avait battu. Elle était encore une fois surprise de se découvrir aussi amoureuse, elle n'avait jamais pensé que ça pouvait être aussi fort, aussi impératif, aussi grisant.

Relevant la tête, il vint la frôler, elle tenta de saisir ses lèvres qu'il lui refusa, en capturant son regard dans le glacier de ses yeux pendant qu'une main aventureuse la torturait délicieusement d'une caresse plus secrète avivant lentement le feu qui couvait dans son ventre, tout en restant douloureusement légère. Plongée dans l'abysse de son regard, elle se sentit frémir entre frustration et plaisir,

Son prénom résonna comme la plus belle des musiques d'amour, roulant de désir, de passion et de tendresse, elle vint le cueillir du bout des lèvres, le savourant un instant avant de le libérer quand elle le sentit bouger contre elle et qu'elle devina son but.

Soudain d'humeur taquine, elle profita de ses bras levés au-dessus de sa tête, emprisonnés dans la camisole de l'étoffe de son chandail pour faire glisser ses paumes sur ses cotes, faisant jouer le bout de ses doigts sur sa peau laiteuse, s'amusant d'y percevoir le frémissement de quelques frissons. Continuant d'agacer ses cotes de ses caresses chatouilleuses, elle vint poser ses lèvres sur son plexus, s'y attardant un instant pour savourer son odeur qui lui enflammait les sens, tout en faisant naître en elle un étrange sentiment de sécurité et de sérénité.

Elle s'amusa encore un peu du bout des doigts sur les vagues de ses cotes, puis, alors que ses lèvres remontaient sur sa poitrine, dessinant un chemin de baisers le long de sa clavicule, jusqu'au creux de son cou, qu'elle agaça un peu, faisant alterner dureté de l'émail, douceur de ses lèvres et souffle brulant sur la peau fine et palpitante, elle laissa sa main glisser sur le ventre doux et chaud de Seth.

Elle enfouit un instant son nez dans le cou de Seth, le frottant délicatement derrière son oreille, se lovant dans sa chaleur, dans sa douceur, laissant sa main continuer son chemin jusqu'à la ceinture, effleurant les boutons, survolant la brûlante tension qu'elle devina sous la toile du Jean, pour venir poser sa main sur sa cuisse sur laquelle elle prit appui pour s'échapper de ses bras et se relever.

Plantant un regard emplit d'une sensualité mêlée d'un peu de timidité dans les yeux d'orage du jeune homme, les joues rosées de désir et d'une pointe de gène, un sourire délicieusement hésitant flottant sur ses lèvres rougis de leurs baisers, elle fit glisser ses mains sur les boutons de sa robe, les défaisant un à un, lentement, jusqu'à ce que la fine étoffe, que plus rien ne retenait, s'étale en corole autour de ses pieds, offrant à son regard adoré les courbes de son corps presque nu.

Le regard de Seth coulait sur elle, la caressant avec presque la même intensité qu'aurait pu le faire ses longues mains fines. Elle se mordilla un peu la joue, tout à la fois une peu embarrassé de son audacieux effeuillage et flattée de ce qu'elle voyait briller dans les yeux de son amant, du feu qui courait sur ses tempes, et même de la légère fumerolle qu'elle devina s'échappant de son nez, bien qu'il tenta de la dissimuler.

Sa voix voilé de désir, profonde, presque grondante raisonna dans la poitrine de Lys, faisant frissonner son cœur, qui se serra toutefois un peu de ses mots, mais elle décida de chasser ce trouble, de ce concentrer sur l'instant présent, sur la chaleur qui semblait augmenter dans la pièce, sans qu'elle sache si c'était un de ses enchantements ou juste l'effet de son propre désir, sur l'homme assis à quelques mètres d'elles, offrant à son regard son torse de marbre blanc.

Au bout de ce qui lui parut une éternité, enfin, il se leva, avec une lenteur qui parut exaspérante à la jeune femme qui brûlait de sentir sa peau contre la sienne. Elle frissonna quand ses doigts imitèrent ses propres caresses, ferma les yeux, s'efforçant de rester immobile quand la douce chaleur de ses lèvres remplaça ses mains.

Les yeux fermés, elle étouffa un soupir lorsqu'elles partirent à la découverte de ses jambes, caressa les sombres mèches de son amant en se mordant les lèvres lorsqu'il la dévêtit, habillant sa peau nue d'un voile de baisers. Elle les rouvrit lorsqu'il la repoussa contre la table, et hoqueta un peu quand elle le vit s'agenouiller devant elle pour déguster un instant la peau de ses cuisses, avant de partir à la conquète d'autres saveurs.

Malgré son désir, elle ne put réprimer un léger mouvement de recul devant la brûlure de ses lèvres, butant contre le plateau de la table, au bord de laquelle elle crocheta ses mains, cherchant à contrôler son souffle et les battements de son cœur, qui déjà semblait vouloir prendre son envol.

Drake avait été passionné, impérieux, exigeant, presque impatient à la faire basculer. Seth était tout aussi déterminé à la conduire dans ses derniers retranchements, mais il était patient, langoureux, joueur. Serrant le bord de la table à s'en faire blanchir les phalanges, Lys, tentait sans grand succès de réprimer les soupirs et gémissement qui roulaient dans sa poitrine et sur ses lèvres, perdant un peu plus le contrôle à chaque effleurement. Elle perdait à chaque seconde un peu plus la raison, oubliant sa réserve, oubliant le monde autour d'elle, oubliant l'arrête de la table qui frottait dans le creux de ses reins.

Comme Drake, Seth lui refusa la grâce de s'interrompre quand elle commença à se sentir basculer, la poussant lui aussi au-delà même de ce qu'elle pensait être le plaisir, au delà même des nombreux cieux si souvent cités, cueillant dans son oubli les soupirs et les gémissements qu'elle lui avait refusé plus tôt. Quand enfin, il cessa ses attentions iniques, elle avait l'impression que ses jambes ne pourrait plus la supporter très longtemps tant elles tremblaient.

Les joues rougies de passion, les lèvres écarlate d'avoir tenté d'en réprimer les expressions les plus sonores, elle posa un regard embué de vertige vers l'homme à ses pieds, et ne put réprimer un petit rire tendre de son expression malicieuse.

Le bruit de la porcelaine la fit sursauter, même si elle s'y était attendue, et elle le regarda d'un air doucement réprobateur en pensant au temps et au soin qu'il avait pris à préparer ces agapes avant de les balayer d'un revers de la main comme il l'aurait fait de quelques miettes qui se serait attardées après un repas.

Son baiser charmant et délicieusement chaste ramena de la tendresse et un délicieux rappel de la douceur de leur amour au milieu de ce moment de passion.

Elle se laissa guider, tournant le cou pour garder le contact de son regard, cherchant à deviner ses intentions, vaguement inquiète. Son inquiétude céda devant les tendres caresses et les baisers qu'il distilla à son dos, découvrant à quel point ses vertèbres étaient si délicieusement sensibles à ses lèvres, rassurée de la chaleur de son corps près du sien. Elle sentit à nouveau quelques frissons agiter les tréfonds de son ventre. Elle se mordit les lèvres pour réprimer un cri quand il rajouta une caresse plus intime à la douceur des baisers qui exploraient sa peau.

Avec une fiévreuse tendresse, il la ramena dans les limbes de l'égarement, au point qu'elle perdit la notion du réel pour se dissoudre totalement dans cet instant d'intimité inégalée. Il la ramena à lui en laissant ses dents explorer le creux de sa taille, elle ferma les yeux attendant une étreinte qui ne vint pas, elle se redressa légèrement sur les coudes, tournant la tête dans le voile de sa chevelure pour deviner ses intentions. Ce qui se passa ensuite la laissa pantelante et désorientée.

Après un léger baiser sur son épaule, elle le sentit s'éloigner laissant ses mains glisser un instant sur ses courbes avant de la quitter. Elle se releva sur les coudes, ramena ses jambes contre elle pour s'asseoir sur la table juste à temps pour le voir reculer jusqu'au siège où il prit place, posant sur elle un regard tempétueux au sein duquel elle se voyait comme au milieu d'un miroir déformant. Dans le regard qu'il posait sur elle à cet instant, elle se voyait sublime, auréolée de tout son amour.

Après quelques instants, elle se laissa glisser de la table, prenant garde à ne pas se blesser sur les vestiges de vaisselle parsemant le sol pour le rejoindre. Tendrement, elle reprit sa place sur ses genoux enroula ses bras autour de lui, se blottit contre sa poitrine, le nez contre son oreille.

« J'ai su, ce jour-là, au restaurant que je pourrais me noyer dans un tel regard. » mumura-t-elle, ponctuant ses mots de léger baiser dans son cou. « Je n'avais pas imaginé que ça pourrait être à ce point. » Ses lèvres glissèrent sur sa mâchoire, pour venir mêler son souffle tremblant au sien. « Je t'aime, Seth. Je t'aime comme je n'aurais jamais cru pouvoir aimer un jour. » avoua-t-elle

Elle s'abandonna un instant dans ce baiser tendre et doux après la fureur qui avait dévasté la cuisine, avant de laisser ses lèvres continuer leur chemin sur son autre mâchoire et rejoindre l'autre oreille qu'elle grignota un instant pendant que ses mains quittaient leurs positions pour explorer le corps du jeune homme, ses bras, ses épaules sous la peau des quelles elle sentit jouer ses muscles, s'aventurant sur ses flancs, s'insinuant entre leurs deux corps pour tenter de faire disparaître les derniers verrous séparant leurs corps.

« Fais-moi tienne. » murmura-t-elle à son oreille. Elle frissonna un instant, d'impatience et de l'audace des mots qu'elle brulait de prononcer, et qui lui échappèrent finalement en un murmure presque inaudible, glissé directement dans le pavillon de son oreille : « Prends moi, fais moi tienne ».

Le sourire qui éclot sur le visage de Seth et qu'elle devina sur son profil quand elle murmura son désir à son oreille fit fondre un peu plus le cœur de la jeune amoureuse.

Aucune tension ne se fit sentir quand il la repoussa légèrement, jusqu'au-delà de son point d'équilibre pour permettre à ses papilles de savourer sa peau. Elle se laissa aller dans ses bras, laissant sa tête retomber en arrière, fermant les yeux, s'abandonnant dans ses bras avec une confiance qu'elle n'avait encore jamais accordé à personne.

Elle partagea son appétit, goûtant son cou et sa nuque lorsqu'il la ramena contre lui, enfermant son corps entre ses bras, laissant ses mains dessiner des arabesques de feu sur leurs peaux, l'un et l'autre se fondant dans le plaisir de l'autre. Lui, soutenant sa taille, elle s'appuyant sur ses épaules, en une danse sensuelle rythmé de la musique de leurs souffles.

Le bal de leurs corps suivait la mélodie de leur amour, de leurs âmes, se fondant l'un en l'autre alternant quadrilles endiablés et lentes valses. Leur étreinte était tout à la fois passionnée et empreinte d'une immense tendresse. À travers leurs gestes transparaissaient ce qui les animait vraiment. Leur enlacement n'était pas la triviale satisfaction d'un simple instinct animal, mais la sublime expression de leur amour, de la fusion de leurs âmes. Leur corps emmêlés, leur regards fondus l'un en l'autre, à travers eux, l'expression « ne faire plus qu'un » prenait à cet instant tout son sens.

Son regard chaviré plongé dans celui de Seth, malgré son cœur battant la chamade, et son corps enflammé par les mains de son amant, Lys se sentait sereine, étrangement sereine en de telles circonstances. Elle éprouvait une sensation de plénitude, comme si, pour la première fois de sa vie elle était pleine et entière, comme si elle venait de retrouver un morceau d'elle-même qu'elle ignorait avoir perdu, comme le soulagement d'une absence dont elle n'aurait prit conscience qu'au moment où elle s'était comblée.

Même le retour des crocs sur sa peau, qui après les évènements de l'après-midi aurait pu lui provoquer un mouvement d'inquiétude ne la perturba pas. La volupté lui fit un instant fermer les yeux, poser sa joue contre l'épaule du dragon et crisper ses mains et ses jambes autour de lui. Ses mots, la fragilité du ton de sa voix la touchèrent profondément, exact reflet de son âme.

« Et tu es le mien. » soupira-t-elle contre ses lèvres, posant son front et son nez contre le sien, encadrant son visage de ses mains.

Elle enroula ses jambes autour de ses hanches, ses bras autour de ses épaules quand il se leva, la soutenant de ses mains sur ses rondeurs. Elle frissonna un peu en entendant crisser la porcelaine sous les pieds nus de son bien-aimé, et instinctivement, elle baissa les yeux vers le sol qu'il venait de fouler redoutant d'y découvrir des traces ensanglantées, mais bien heureusement, ce ne fut pas le cas. La fragilité de son ton et l'absence de la personnalité de Drake dans leurs ébats lui avait fait oublier un instant que le jeune homme n'était pas assez vulnérable pour craindre quelques morceaux de verre.

À nouveau, elle se perdit dans le regard amoureux qu'il posa sur elle après l'avoir délicatement déposé sur la table. Les yeux dans les yeux, il l'emporta dans une nouvelle valse. Elle se perdait autant dans l'embrasement de ses sens que dans l'univers de son regard. À travers ses prunelles, elle avait l'impression de contempler un morceau de cosmos avec ses étoiles scintillantes, ses nébuleuses argentées et ses soleils éclatant. Un univers qui n'appartiendrait qu'à eux.

Le filet d'eau glacé coulant entre son dos et la table brisa un instant le charme, elle se cabra contre lui avec un petit cri de surprise, avant d'être prise d'un léger fou rire assez mal venu, qui redevint soupir sous ses caresses.

À présent habillée de pétales, elle laissa à nouveau le bonheur l'emporter, sans qu'il ne lui autorise cependant de se perdre complètement. Seth était joueur, patient, intuitif, modulant les rythmes pour la garder toujours à mi-chemin, dans un état où le plaisir et la frustration provoquait un certain bien être qu'elle adora voir se prolonger.

Rouvrant les yeux après un instant de léger égarement, elle retrouva l'ombre de ses ailes, leur couleur lui sembla différente, tirant plus sur l'indigo que sur le pourpre, mais elle n'avait pas vraiment la tête à s'attarder sur cet étrange changement, le corps et l'âme délicieusement torturés par les attentions de son amant.

Les mots murmurés furent une diversion efficace, ses lèvres sur elle encore plus. Il la cueillit délicatement au milieu de la mer de pétales, et elle retrouva le confort de ses bras avec un petit sourire paresseux. Seth semblait aimer la porter entre ses bras, serrée contre son torse, et il se trouve qu'elle découvrait à chaque fois un peu plus qu'elle adorait être traité de la sorte, d'être bercée dans ses bras comme une petite chose fragile et délicate. Elle passa un bras autour de ses épaules, posant sa tempe contre sa clavicule, le regard levé vers son visage.

Le battement d'ailes lui provoqua un petit sursaut, puis un éclat de rire quand il se posa sur le palier avec un petit sourire satisfait. Elle leva la main et la posa sur sa joue le regardant avec une tendresse amusée.

« Cabot va. » le taquina-t-elle alors qu'il se dirigeait vers la porte de la chambre d'un pas élastique et décidé.

Leur ultime danse fut la pure expression de leur entièreté, faisant bruisser la chambre et les draps de la mélodie de leur bonheur, construisant autour d'eux un cocon d'où leur amour ressortirait encore plus éclatant.

À présent, apaisée, blottie contre lui, la tête confortablement lovée au creux de son épaule, bercée par le son apaisant des battements de son cœur, un doigt paresseux dessinant des arabesques sur sa poitrine, elle souriait.

L'amour, elle en avait rêvé souvent, elle en avait même pleuré, et elle réalisait qu'elle ne l'avait jamais vraiment vécu. À coté de leur histoire, celle d'avant lui semblait n'avoir été que de pales contrefaçons. Avec aucun d'entre eux, elle n'avait jamais envisagé de renoncer à sa liberté. Avec aucun d'entre eux, elle n'avait jamais eu cette impression d'appartenance, ce désir d'abandon. Elle était à lui. Quoi qu'il advienne à présent, elle savait que son cœur n'appartiendrait jamais qu'à lui. Et elle savait aussi que la réciproque était vraie. Il n'y avait pas de rapport de force entre eux, il ne cherchait pas à l'enfermer, elle avait même la sensation que c'était le contraire. Il la voulait libre. Aussi libre que lui. Et avec lui, elle avait parfois l'impression qu'elle aussi se sentait pousser des ailes.

Elle secoua un peu la tête, frottant sa joue contre sa peau douce et chaude, s'adressant à elle même un sourire moqueur, avant de se tourner pour s'allonger sur le ventre, le menton posé sur le bras de son amour, posant sur ses traits à présent serein un regard empreint d'une immense tendresse.

Elle avait su dés le premier soir que cette rencontre était de celle qui comptait dans une vie. Elle avait compris pendant ces quelques jours avec lui, que leur vie serait chamboulée par cet amour. Après cette nuit, ce qu'elle ne savait pas encore, c'est qu'elle ne pouvait même pas imaginer à quel point elle était encore en dessous de la vérité.

Elle savait qu'il ne dormirait pas avec elle, elle avait compris que le simple bonheur de s'endormir et se réveiller dans les bras l'un de l'autre leur serait toujours interdit par sa nature même, mais ce soir, elle voulait prolonger la magie.

« Tu restes un peu avec moi ? J'aimerais m'endormir dans tes bras. » lui demanda-t-elle.